J'ai failli écrire "un débat qui fait avancer les choses" : mais il ne faut pas exagérer quand même.
En tous cas, ça réconcilie avec les hommes politiques. Hier, j'ai zappé sur France 2 et ai vu la fin de "A vous de juger", l'émission d'Arlette CHABOT, avec
Malek BOUTIH et Luc FERRY.
Il paraît que malgré la caricature, (un court extrait où COHN-BENDIT reproche à ROYAL sa bêtise ou je ne sais trop quoi) qu'on a retransmise sur les
radios du débat, ces deux intervenants-ci s'étaient également écoutés. Et si c'était celà la vraie qualité d'Arlette CHABOT, faire venir ensemble des gens capables de s'écouter et faire avancer
des idées, à défaut de faire avancer les choses ?
BOUTIH sort du discours misérabiliste et connaissant bien ses quartiers, pointe les vrais problèmes. Il n'hésite pas à avancer des propositions révolutionnaires
comme reconquérir les quartiers. Mais son discours, ce n'est pas "il nous faut plus de moyens plus de postes". Son discours sur la "reconquête" sonne plus "militaire". Il invite aussi les
assistantes sociales à ne pas se contenter de distribuer des chèques mais d'aller constater la réalité des besoins en visitant les familles.
Luc FERRY sait écouter son interlocuteur et bien que prof de fac, connaît bien le problème des enseignants de collège et de lycée, qu'il a pris, manifestement, le
temps d'entendre (à l'évidence mieux que Ph. MERIEUX !). Et il avance des solutions pédagogiques novatrices concrètes. Qu'il a pu mettre en place quand il était ministre.
C'est ce qu'atteste par son témoignage une "proviseure" de lycée de l'académie de Versailles. Le principal d'un collège invite à travailler avec tous les
partenaires : éducateurs de rues, policiers, directeurs de MJC... ce qui me rappelle de bons souvenirs.
Mais ces responsables d'établissements ne peuvent rien faire si leur hiérarchie ne les laisse pas sortir des sentiers battus (c'est le rôle du recteur, mais c'est
encore mieux s'il est encouragé par son ministre de tutelle), réorganiser les programmes, utiliser leurs moyens en enseignement de façon opportune par rapport à la situation réelle du public. Et
il n'y a pas besoin de moyens énormes pour ce faire : il faut simplement utiliser ceux dont on dispose, mais de façon utile (exemple de propos qui décoiffe : "il y a des classes où 35 élèves ne
posent pas de problème, et d'autres où l'on ne peut pas travailler à plus de 10 !").
Dans la situation actuelle, c'est ce que dénonce la représentante du SNALC, qui a le plus fréquemment cours : les chefs d'établissements font le gros dos et tant
qu'ils ne sont pas eux-même agressés, laissent les enseignants se débrouiller face à l'agressivité de leurs élèves. La responsabilité des chefs d'établissements est un sujet tabou : ils
bottent généralement en touche en affirmant "M. Un tel n'a pas d'autorité", quelquefois ils ajoutent "n'a pas d'autorité naturelle". Et là, mon opinion est que c'est l'Hôpital qui se fout de
la Charité. Car, comme dans une famille, il faut une congruance dans le comportement des adultes de l'institution, sinon le message éducatif est brouillé. C'est ce que disaient
les profs d'un de mes anciens collèges : "ici, on a un confort pour travailler car quand on a un problème, on le signale. L'élève et sa famille sont convoqués (le samedi matin, car alors, on
travaillait le samedi matin ! et que les parents étaient disponibles ce jour-là) par le principal et le principal adjoint".
Il faut enseigner les "codes" de la vie en société a enchéri quelqu'un (M. BOUTIH me semble-t'il)... C'est ce que l'on appelait autrefois l'instruction
"civique" et la "morale" : j'aime bien le nouveau nom qui pourraît être donné à ces deux enseignements.
Madame la Proviseur, dont j'ai oublié le patronyme, montre le "contrat de réussite" que l'on signe dans son lycée. Il faut prendre beaucoup de temps pour
discuter et expliquer. C'est son rôle et cellui de ses CPE : elle affirme avoir 85 % de réussite avec ce système. Une de mes amies, professeur dans un collège de Saône et Loire, avait
eu cette idée, il y a une quinzaine d'années. Elle passait des contrats d'objetcifs avec ses élèves les plus difficiles. Comme cette idée lui était venue à la suite d'une psychothérapie
qu'elle avait faite ("la psychothérapie", disait-elle, "c'est comme l'archéologie. Il s'agit de dégager les couches les unes après les autres, pour voir ce qu'il y a en dessous".) et
qu'elle ne s'en cachait pas, ses chers collègues et sa hiérarchie n'ont pas tardé à faire courir qu'elle était folle et/ou appartenait à une secte ! La dernière fois que j'ai eu des nouvelles
d'elle, elle était en congé maladie à cause du "harcèlement moral" qu'elle avait dû endurer. J'espère qu'elle sait que dans un lycée de "zone sensible", un proviseur a généralisé son expérience
!
Et puis un rappel : les enseignants enseignent, les parents éduquent.. Le principal du collège lance l'idée d'ouvrir des "écoles des parents".