En ce jour de 1er mai, un extrait de "la croissance de la famine", publié en 1982.
"Sous prétexte de combattre l'austérité, le parti communiste français oublie systématiquement, ces temps derniers, de parler du pillage du Quart Monde.
L'austérité s'impose pour le tiers le plus riche de la population française, y compris donc pour les plus hauts salaires : mais la CGT ne lutte pas assez contre une réduction de l'éventail des salaires, lutte qui devrait être menée de front avec le combat contre les profits
abusifs.
Revoir notre civilisation en vue de permettre sa très longue
survie exige d'abord, dans les pays développés, une lutte pour la réduction drastique de toutes les inégalités sociales, sur le plan national comme sur
le plan mondial. Il faudrait, chez nous, revoir d'abord la condition des travailleurs immigrés. Sur le plan international, aider à l'émancipation économique réelle du Quart Monde ;
d'abord, en cessant son exploitation, notamment par l'organisation des marchés mondiaux de matières premières, minérales et agricoles; en
commençant, nous l'avons déjà dit (p. 76), par les céréales et le pétrole. Comme Jean Daniel le faisait remarquer à Giscard, au cours d'une conférence de presse à la fin de 1974, les délégations
françaises aux grandes conférences internationales (New York, Caracas, Bucarest, Rome...) ont toujours suivi leur pente naturelle, en prenant le parti des pays nantis.
Pour refaire notre civilisation, il nous faudra repartir de la base. Changer notre attitude, en gaspillant moins (viande, autos, chauffage...).
Prendre part aux luttes locales, aux comités de quartier, pour défendre tout ce qui vit, et pas seulement en ville. Recycler toutes nos ordures :
papiers, cartons, métaux, déchets organiques... Prendre en toute circonstance la défense des absents, les générations futures. Ces éléments
de base, une fois fortifiés, pourront se fédérer et obliger nos politiques à tenir davantage compte des déshérités de notre « petite planète » d'aujourd'hui, comme des arrière-petits-enfants du
monde de demain.
Jusqu'à présent, nos gouvernements ont d'abord défendu les privilèges. Quoi qu'ils en disent, ils ont
comme objectif principal de se maintenir au pouvoir, quitte à faire des concessions sur certains aspects superficiels ou sur les problèmes secondaires. Ils parlent beaucoup du changement
et sont certes obligés, dans la situation nouvelle, de louvoyer entre les écueils que dans toutes,les directions, ils sont obligés de repérer. II faudra les obliger à aller plus loin, à
tenter la grande aventure d'un nouveau contrat social... à mesure que progressera la formation de l'homme nouveau, sans lequel l'humanité n'a plus
guère de chances d'une survie vraiment prolongée.