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29 septembre 2008 1 29 /09 /septembre /2008 19:03

Marie de Rabutin Chantal était un familière du Bourbonnais : sa grand-mère, Jeanne de Chantal (sainte Jeanne de Chantal ) est une des fondatrices de l’ordre de la Visitation avec saint François de Salles et elle mourut au couvent de Moulins.
D’autre part, la marquise, qui souffrait de rhumatismes a effectué deux séjours à Bourbon-l’Archambault et dix ans plus tard, un séjour à Vichy.
En mai 1676, elle s'arrêta à Moulins où elle logea chez Mesdames Fouquet et écrivit :
"J'ai été voir ces pauvres dames Fouquet, qui se sont acheté une petite maison de campagne aux environs de Moulins". Cette "petite maison de campagne" était le château de Pomay, à Lusigny, édifice construit en briques rouges et noires, comme tant d'autres demeures de la Sologne bourbonnaise, notamment Paray-le-Frésil,déjà évoqué (cf. Simenon et la Sologne Bourbonnaise.)
Elle qui aimait exercer son esprit caustique aux dépends des gens de son entourage, est en effet restée une amie très fidèle de cette famille, malgré ses épreuves.

Nicolas Fouquet (1615-1680) était le fils d’un parlementaire fortuné qui était aussi un des hommes de confiance du cardinal de Richelieu. Ses ancêtres, des "entrepreneurs" comme l'on dirait de nos jours, s’étaient au fil des générations, constitué une fortune considérable : parts  au sein des différentes compagnies maritimes comme la Compagnie des îles d'Amérique, du Sénégal ou encore de la Nouvelle-France. Lui-même, fut en 1640 l’un des premiers actionnaires de la Société du Cap-Nord et en 1642, il entra dans la compagnie des Indes orientales.
Nicolas Fouquet avait épousé en premières noces Louise Fourché de Quéhillac, petite-fille d’un maire de Nantes. Ce fut un riche mariage : Louise apportait en dot 160 000 livres en argent et rentes sur des particuliers plus la terre de Quéhillac. Et Nicolas reçut de ses parents la propriété de sa charge de maître des requêtes estimée à 150 000 livres, plus une rente confortable. Peu après son mariage, six mois après avoir donné naissance à une fille, Marie, Louise Fourché de Quéhillac mourut. Un second mariage fut conclu en février 1651. La nouvelle madame Fouquet, Marie-Madeleine de Castille-Villemareuil, appartenait à une famille de marchands anoblis. Sa dot était inférieure à celle de Marie Fourché, mais elle apportait à son nouvel époux un vaste cercle de relations.

En 1641, alors qu'il n'avait que 26 ans, Nicolas Fouquet, s'était porté acquéreur de la seigneurie de Vaux le Vicomte. En quinze ans, il fit édifier un château et un jardin, qu'on disait les plus beaux de France. Les trois hommes choisis par Fouquet pour y œuvrer étaient : l'architecte Le Vau, le peintre-décorateur Le Brun et le jardinier-paysagiste Le Nôtre. Il s'était aussi progressivement entouré d'une petite cour : notamment des écrivains comme Molière, La Fontaine, Scarron, Madeleine de Scudéry... Et Marie de Rabutin Chantal, marquise  de Sévigné.

La carrière de Fouquet avait déjà connu une ascension rapide, à l'image de l'emblème de sa famille, l'écureuil et de sa devise "Quo non ascendet" ("jusqu'où ne montera t'il pas ?"). A cause de la fortune personnelle dont il disposait, le cardinal Mazarin, Premier Ministre, l'avait, en 1653, nommé à la charge de surintendant des Finances. Sa mission :  renflouer les caisses du Trésor qui étaient vides, un mal récurrent. ll s’agissait de rétablir la confiance et d’orienter l'épargne pour qu’elle  alimente le trésor royal. Chaque emprunt qu'il négociait sur le marché des capitaux pour le compte du roi était garanti sur sa fortune personnelle et lui laissait, en contre partie une forte part de bénéfice.
Nicolas Fouquet contribua de façon décisive au redressement des finances du royaume. A la mort de son mentor, Mazarin, il espérait bien lui succéder en qualité de Premier Ministre. Sa charge l'amenait fréquemment à collaborer avec l'intendant privé du cardinal, Jean-Baptiste Colbert, descendant d'une dynastie de grands marchands-banquiers, au cœur de toutes les affaires, et qui réalisait au passage, lui aussi, de beaux profits.

Il semble que Nicolas Fouquet se soit livré à d’audacieuses combinaisons financières :  que Colbert n'eut de cesse de  dénoncer au roi comme des obstacles à une saine gestion du trésor royal.

De rumeurs en médisances, et parce qu'il était un peu hâbleur, appremment, le sort de Nicolas Fouquet fut scellé peu après la mort de Mazarin. Voltaire put écrire : « le 17 août (1661) à 6 heures du soir, Fouquet était le roi de France, à 2 h du matin, il n’était plus rien ». 
Et le 5 septembre 1661, à Nantes, sur ordre de Louis XIV, d'Artagnan, capitaine des mousquetaires, arrêtait le Surintendant Fouquet pour le déférer devant les juges d'une cour d'exception spécialement constituée.
Un demi-siècle plus tard, dans ses Mémoires, Saint-Simon évoque Nicolas Fouquet, qui « après avoir été huit ans Surintendant des Finances, paya de dix-neuf ans de prison les millions que le cardinal Mazarin avait pris, la jalousie de M.M. Le Tellier et Colbert, un peu trop de galanterie et de splendeur ».
Les historiens contemporains tendent à beaucoup relativiser les prévarications dont se serait rendu coupable le surintendant.
Deux chefs d'accusation lui furent opposés : le péculat (détournement de fonds publics par un comptable public) et la lèse-majesté, crimes passibles tous deux de la peine de mort. Il avait vendu sa charge de Procureur Général au Parlement de Paris qui l’aurait soustrait à toutes juridictions autres que celle de ses pairs. Son procès traîna plus de trois ans et tourna à son avantage. Le roi escomptait que soit prononcée la peine capitale, mais la majorité des juges vota le bannissement : Fouquet aurait pu recouvrer la liberté hors des frontières du royaume. 
Louis XIV décréta pourtant la prison à vie pour son ancien ministre : il fut enfermé à Pignerol, forteresse  des Alpes où il mourut le 23 mars 1680.

Le roi s'était assuré, avant l'arrestation de son surintendant, qu'il avait bien versé toutes les liquidités qu'il s'était engagées à verser au Trésor. Après l'inculpation de Nicolas Fouquet, Vaux le Vicomte fut mis sous scellés et le Roi saisit, réquisitionna ou acheta : les tapisseries (au nombre de 120 : imagine-t'on la valeur de 120 tapisseries d'Aubusson ou des Flandres ?), tous les orangers, les statues, le mobilier etc...

Sa femme, Marie-Madeleine de Castille-Villemareuil, et ses 5 enfants furent quant à eux, exilés : c'est en 1671 qu'elle acquit le château de Pomay à Lusigny, bien modeste masure à côté de Vaux-le-Vicomte. Ils avaient un pied à terre à Moulins. Elle hébergeait aussi sa belle-mère.
Les registres paroissiaux de Lusigny nous informent de leurs activités ordinaires : baptêmes de cloches, parrainage d'enfants d'un laboureur (série E des A.D. de l'Allier). En 1683, Marie Madeleine, la troisième enfant du couple, épousa le chevalier Crussol d'Uzès dans la chapelle du château, devant une brillante assistance.
Le dernier des fils s'appelait Louis et hérita du titre de marquis de Belle-Isle (en Mer) (1661-1738). Il épousa Catherine-Agnès de Lévis, fille du marquis de Charlus.
Le petit-fils de Nicolas Fouquet, le comte de Belle-Isle, avait fait une brillante carrière militaire depuis l'âge de 17 ans. Plusieurs fois blessé, il était, en 1719, maréchal de camp. Puis vers la quarantaine, il avait souhaité se consacrer à ses affaires domestiques, notamment la construction d'un très bel hôtel particulier à Paris. Mais en 1723 éclata un autre scandale financier :  le trésorier de la Caisse de l'Extraordinaire des Guerres fut convaincu de malversations, or le comte de Belle-Isle était très lié au ministre de la Guerre et il fut accusé "d'avoir diverti une partie des fonds de la caisse [..] et d'y avoir substitué des billets de banque dans le temps de leur discrédit". Il fut arrêté en 1724 et embastillé en compagnie de son frère.
Après une année d'emprisonnement à la Bastille, il fut exilé, comme sa grand-mère. La lettre de cachet stipulait qu'il devait résider à plusieurs dizaines de lieues de Paris. Il parvint à négocier le choix de Nevers, plutôt que le Languedoc où le roi avait tout d'abord pensé le consigner. Il visita des connaissances bourbonnaises (son oncle était le duc de Lévis, dont le château était à Lurcy-Lévis) au cours de la période du 5 mai 1725 au 7 juin 1726. Son frère, le chevalier de Belle-Isle l'accompagna tout au long de la durée de son exil.
Apparemment dans le but de démontrer qu'il n'occupait pas son temps à des occupations de "lèse-majesté", le comte de Belle-Isle tint un journal détaillé de faits tout à fait anodins ! Ce journal, assez surprenant, a été retrouvé par Arnaud de Maurepas, a été édité en 1994 par la Société bourbonnaise des Etudes locales (Etudes bourbonnaises n° 267). On y trouve quelques noms connus et quelques autres qui restent à identifier.
 

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