Le 23 juin 1640 :
Jacques Puesche, fermier en charge de recouvrer le montant d’un emprunt sur l’Hôtel de ville de Paris est assassiné en l’hôtel du Petit Dauphin, dans le faubourg d’Allier, où il était descendu. Les mutins s’emparent de sa caisse.
23 juin – 8 juillet :
Les insurgés, des habitants du faubourg d’Allier, tiennent leur faubourg, en interdisant l’accès aux représentants du pouvoir royal et des réunions séditieuses sont organisées « pendant la nuit ». Des « libelles et placards» menaçant de mort divers officiers, sont affichés dans la ville.
Entre le début du mois de juillet et le 18 juillet c’est donc un « sauve qui peut »
- - des officiers du Présidial qui « en grand nombre s’estaient semblablement résolus de quitter la place après mille injures, menaces et insolences ».
- - Les Trésoriers déclarent : « pluseurs de nous » sont contraints « à se retirer nuictemment loing d’icy pour y chercher le seurté de leurs personnes ».
- - Le procureur du roi, Etienne Beaugis, menacé de mort, fuit à Paris où il reste caché pendant 4 mois.
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- Le gouverneur du Bourbonnais est alors Claude Maximilien de la Guiche qui se fait appeler comte de Saint Géran. Il est aussi comte de Lapalisse. Avec l’« envoyé extraordinaire du roi à Moulins pour la diffusion de l’emprunt » : Laffargues et Claude Roy, maire ET lieutenant général de la généralité, ils se sont retranchés dans le château.
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Vers le 15 juillet :
- à la 4e semaine de soulèvement, ordre est donné par les échevins de fermer les portes de l’enceinte médiévale et d’interdire son accès aux habitants des faubourgs. Ce qui n’avait pas été fait jusque là.
Le lundi 16 juillet : a lieu une première tentative de négociations : Saint Géran convoque au château de Moulins les habitants de la ville et des faubourgs, prend note de leurs doléances.
Il en convainc un certain nombre de prêter un serment de « parfaite fidélité » au roi.
Dans une lettre lettre de Saint Géran au chancelier Séguier datée du 21 juillet, il annonce qu’il a fait abroger de nombreux impôts.
Le 18 ou 19 juillet, la garde bourgeoise du faubourg d’Allier arrête 9 « coquins », qui sont déférés au vice sénéchal afin qu’une enquête soit ouverte. Ils sont interrogés chez le vice sénéchal dont le logis est sur la grande place.
- Le chef des « séditieux », le boucher Rivet, arrive en compagnie de 2 autres bouchers pour exiger leur libération. Sur la grand place l’attendaient 150 hommes des faubourgs, armés et « le tambour battant ». Il fait état d’un renfort potentiel de 500 personnes.
Le 21 juillet, ordre est donné par le chancelier Séguier au gouverneur Saint Géran de convoquer les nobles pour réduire les mutins par la force. Mais la noblesse ne bouge pas.
Le 27 juillet, un des mutins arrêtés est pendu sur la grand place. Deux autres mutins sont condamnés aux galères perpétuelles.
- Saint Géran affirme : « cest exemple de punition faict sans emotion a remis l’obéissance du roy dans les espritz des plus mutins »
- Saint Géran demande au roi des renforts et l’aide d’un personnage qu’on n’avait jusqu’alors pas vu à Moulins : « qu’il lui » … « plaise m’envoyer Monsieur de Chaponay » (Chaponay est l’intendant de Bourbonnais).
Le 4 août, Claude Roy, maire et lieutenant général en l’élection de Moulins, part pour Saint Amand, plus précisément pour le château de Montrond où résidait le prince de Condé, qui à la même période prend aussi les eaux à Pougues. Il informe Séguier de troubles à Montluçon dont il a eu connaissance. Ils y sont peu graves, mais « Clairmont en Auvergne et aultres villes » se sont aussi « éloignées de leur debvoir ».
On espérait une médiation du prince de Condé, un prince du sang, qui avait été gouverneur du Bourbonnais vingt ans auparavant. Se retrouvent donc à Montrond :
- - la municipalité de Moulins (les échevins et le maire)
- - les représentants des séditieux, dont un marchand ferratier qui, avec l’autorisation de Saintr Géran, avait été désigné comme« député » des mutins.
Pour racheter leur faute et mériter l’amnistie, Condé leur demande de
- 1°) restituer l’argent de Puesche
- 2°) arrêter et punir les principaux responsables de son assassinat
- 3°) donner les gages de leur fidélité au roi.
Le délégué des insurgés, le marchand ferratier, demande à un membre de l’entourage du prince de Condé s’il veut bien aussi recevoir les capitaines des faubourgs. Il se voit menace de mort et doit s’enfuir.
Le 15 août, Saint Géran, se conformant aux directives de Condé, tente de procéder à l’arrestation des personnes suspectes d’avoir pris l’argent de Puesche mais « il ne trouve aucun soutien de ceu qui pourtant devraient l’aider ». En outre, un échevin a laissé échapper un détenu (d’autres versions disent trois) et lorsque le gouverneur veut arrêter cet échevin, tous les autres insistent pour qu’il soit libéré.
Le 24 août : « Sur l’advis que j’ay eu que quelques principaux autheurs de la sédition avoient des inteligences avec des séditieux des provinces voisines et qu’ilz estoient sur le point de commencer quelques désordres… déclare Saint Géran, je me suis hasardé de faire prendre celuy qui estoit tenu pour le chef ».
- C’est alors le boucher Rivet. Il est arrêté dans le faubourg de Bourgogne, à l’auberge du Cerf Volant. Avec un autre habitant du faubourg, ils tentent, en vain, de s’opposer aux quelques soldats du gouverneur et aux arbaletriers du vice séneschal.
- Pour venir en aide à Rivet, les habitants des faubourgs sonnent la cloche du grand pont d’Allier afin d’alerter le reste de la population. Ils procèdent de même à la porte de Bourgogne avec la cloche du couvent des Augustins.
- Moreau, un marinier, vient à genoux devant le gouverneur, et tente d’obtenir que l’on relâche Rivet. Il est arrêté. Les habitants des faubourgs tentent de forcer les portes de ladicte ville quy avoient esté pour ce subiect fermées »… « Sy bien qu'on ne pourroit avecq seureté exécuter le jugement ».
- Seul le château à l’abri derrière ses murailles et ses fossés était sûr : il fut donc décidé de procéder là à un jugement sommaire. Rivet est condamné à mort. Il devait être exécuté sur-le-champ. Mais il est impossible de trouver un charpentier pour dresser la potence. On fait amener de la prison un détenu qui pend Rivet à une fenêtre du château.
Dans la nuit du 24 au 25 août » […], « les habitants du faubourg d’Allier et aultres complices en grand nombre auraient tirés plusieurs coups darquebusades et fusilz à ceux qui estaient en garde à la porte d’Allyer ». Le reste des mutins du faubourg d'Allier entreprend de rompre les portes et de forcer les grilles de la ville. « Mais ils furent vigoureusement repoussez par les habitants d’icelle qui estoient en garde dont aucuns àyans receu quelques coups ils en blessèrent plus grand nombre desdicts mutins, en tuèrent un d'entr'eux sur la place en sorte qu'ils furent contraincts de se retirer sans effect »
- Un autre rapport nous apprend que les bourgeois de Moulins, tirant du haut du rempart, ont fait deux morts et « d’autres blessés en grand nombre »
- Les nouveaux meneurs de la sédition s’appellent Lachenay et Lamarion.
- La milice bourgeoise menée par un avocat, riposte, rejette l'attaque et blesse, entre autre Lamarion.
- Après quoi « les séditieux [se retirèrent] dans leur quartier avec menasses d'affamer la ville, de pendre et tuer tous les habitants dicelle quilz rasurroient attraper ».
Le 26 août, les séditieux exécutent leurs menaces et empêchent les vivres d'entrer dans la ville. De plus ils arrêtent deux cavaliers de la compagnie du gouverneur et un bourgeois de Moulins. Ils menacent de les pendre si on ne leur rend pas le marinier Moreau. On finit par procéder à un échange de prisonniers.
- Lachenay aurait déclaré « que nous heussions à nous bien desfendre car il n'y avait point de paix ni de quartier pour nous ».
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- Mais c'était la fin du soulèvement de Moulins
- Beaucoup d’habitants des faubourgs se sont réfugiés dans les forêts et villages alentour. Il y a une vague d’arrestations.
- En septembre, le roi accorde des mesures d’amnistie, y compris pour les condamnés à mort qui n’ont pas été exécutés. Mais les habitants de la ville doivent venir faire amende honorable devant le gouverneur et il a fallu les convoquer à plusieurs reprises : on était alors à la fin du mois de septembre, Moulins était entourée de vignobles et beaucoup qu’on était en période de vendanges et qu’ils étaient donc occupés pour ce faire.